Leçon 16 : L'exploitation des fichiers AVI La disponibilité des Webcams (petites caméras CMOS ou CCD pouvant se connecter rapidement à un PC via un port USB) offre quelques perspectives intéressantes dans le domaine de l'observation astronomique. Les performances de ces caméras sont certes limitées (impossibilité d'effectuer des poses longues, détecteur de petite taille, bruit de lecture relativement élevé, réponse spectrale par très bien définie, ...) mais la facilité d'utilisation et le faible coût (compter entre 300 et 1000 F) sont suffisamment motivants pour amener bon nombre d'observateurs à faire leur premiers pas en imagerie numérique du ciel en leur compagnie. La possibilité d'acquérir de nombreuses images par seconde permet même d'entreprendre certains travaux avec au moins autant d'efficacité qu'une caméra astronomique "lourde". C'est le cas en observation planétaire où la forte réactivité de ces caméras, couplée à la possibilité de pratiquer massivement la sélection des meilleures images, peut faire merveille. La stratégie d'observation consiste ici a acquérir au besoin des séquences de plusieurs centaines d'images, puis de ne retenir que celles qui sont le moins perturbées par la turbulence atmosphérique. Ces dernières sont ensuite additionnées pour constituer le document final. On gagne alors sur deux tableaux : (1) la sélection d'images est une excellente méthode pour réduire en partie les effets néfastes de la turbulence, (2) le compositage d'un grand nombre d'images permet de compenser la faible dynamique des Webcams (augmentation du rapport signal sur bruit). En outre, des images couleurs sont directement obtenues, ce qui donnent un rendu photovisuel agréable au disque planétaire (mais malheureusement pas toujours apte à servir à une exploitation scientifique des clichés compte tenu de la mauvaise définition des bandes spectrales). Ce "promener" sur la Lune ou la surface du Soleil avec une Webcam constitue un expérience tout à fait réjouissante. Dans le cas du Soleil, l'étude dynamique de l'évolution des taches solaires ou des protubérance est par exemple envisageable. A vrai dire le champ d'application est grand. Enfin, les Webcams sont des outils pédagogique indéniables : l'utilisateur peut expérimenter les phases d'acquisition, de prétraitement, ou encore d'analyse qui sont communes à toutes les caméras CCD astronomiques et ceux, pour un coût minimal. Il n'y a pas de moyen avec la présente version de Iris de commander directement une Webcam. En revanche, il est possible de récupérer les images provenant du logiciel de pilotage fournie avec la Webcam. Les fichiers images sont alors généralement disponibles sous deux formes : des images en format BMP et des films en format AVI. La commande Conversion BMP... du menu Fichier permet d'importer facilement des séquences de fichiers BMP 24 bits pour les transformer en des images exploitables avec les logiciels de traitement astronomique : Dans cet exemple on convertie une séquence de 15 images BMP ayant pour nom générique JUP_1 (images JUP_1, JUP_2, JUP_3,... JUP_15). Iris produits 3 séries d'images en sortie ayant pour nom générique R, V et B. La commande équivalente depuis la console est : CONVERTBMP24 JUP_ R V B 15 Mais revenons aux fichiers AVI. En lançant la commande Conversion AVI... du menu Fichier vous ouvrez une boite de dialogue qui permet de convertir les images contenues dans le film AVI en des images individuelles qui sont sauvegardées automatiquement sur le disque sous un format astronomique (FITS ou le format propriétaire PIC). Cette commande convertie un flux vidéo dans son intégralité et il n'est donc pas possible de sélectionner des images avant conversion. Cette fonction de Iris n'est pas non plus un visualiseur de film AVI. Pour réaliser ces dernières opérations il faut exploiter un logiciel spécifique, comme l'excellent AVI2BMP de Emmanuel Depigny. Il est cependant possible sous Iris de pratiquer une sélection, mais celle-ci est effectuée à partir des images stockées dans un format astronomique (voir plus loin). Sélectionnez le fichier AVI à convertir. Ensuite, décidez si vous souhaitez faire la séparation des images trichromes du fichier AVI. Dans cette situation, Iris produira 3 séries d'images correspondant aux canaux rouge, vert et bleu (vous devez fournir le nom générique de ces images). En sélectionnant l'option Noir & Blanc Iris produit une séquence unique d'images dans laquelle l'intensité des pixels est la somme des canaux rouge, vert et bleu. Le zone d'édition Délai entre images définie le temps (en secondes) que vous souhaitez voir s'écoulé entre l'affichage de deux images consécutives du film. Evitez de mettre une durée excessive ici car l'execution du film AVI peut s'éterniser. Une valeur de 0 seconde correspond à la vitesse d'affichage maximale (nota : vous pouvez entrer des nombres factionnaires, par exemple 0.3). L'option Suppression des redondances est importante avec les films AVI. Ceux-ci ont en effet la fâcheuse tendance de dupliquer les images afin de donner le sentiment d'un film fluide, alors même que l'acquisition a été saccadée. Ces redondances doivent généralement être supprimées pour effectuer un traitement d'image correct par la suite. Pensez alors à bien cocher cette case. En cliquant sur le bouton Afficher vous jouez le film AVI à l'écran. En cliquant sur Convertir, le film s'affiche encore, mais en plus les images converties sont enregistrées dans votre répertoire de travail. Dans l'exemple, on travaille sur un film AVI ayant pour nom JUP4.AVI. La séquence monochrome produite a pour nom générique I (images I1, I2, I3, ...). Avant que IRIS lance la conversion proprement dite, qui peut prendre du temps et surtout occupée un espace disque substantiel, une confirmation de vos options est demandée : Dans notre exemple Iris n'a gardé que 66 images (ce qui signifie que le film contenait près de 50% de redondance !). Cette information s'affiche dans le fenêtre de sortie de résultat. Une fois la conversion réalisée, l'opération suivante consiste généralement à trier les meilleures images de la séquence (les variations de qualité sont pour l'essentiel provoquées par la turbulence atmosphérique). Souvent la sélection est plus efficace sur une séquence d'images que l'on a traitée afin d'accroître les contrastes. Une bonne solution consiste à appliquer la technique du masque à toute la séquence (commande Masque flou d'une séquence... du menu Traitement) : Dans l'exemple, on produit une nouvelle séquence de 66 images ayant pour nom générique CTL avec un contraste relevé. A ce stade il y a deux écoles :
Des essais valant mieux qu'un long discours, il faut effectivement expérimenter pour sélectionner la bonne école pour une situation particulière. De manière générale la seconde procédure est préférable. Activez l'outil Sélection d'images... du menu Visualisation : Entrez le nom générique des images sur lesquelles la sélection va porter (séquence I). Nous utilisons ici une séquence de contrôle qui va permettre de faciliter la sélection (séquence CTL). Entrez ensuite le nom de la séquence des images retenues. L'index courant de sortie est l'indice ajouté au nom générique de la prochaine image sauvegardée. Vous balayez la séquence d'entrée en cliquant sur les touches flèche droit ou gauche. Lorsque vous désirez stocker une image dans la séquence de sortie, cliquez sur Sauver. Dans l'exemple de la figure ci-dessus l'image visualisée est CTL7. Si on clique sur Sauver l'image I7 est copié dans une image ayant pour nom K3. Les index sont alors automatiquement incrémentés (nota : la valeur de l'index de sortie peut être modifiée manuellement). Il est possible de traiter l'image courante qui apparaît à l'écran, en appliquant un filtre du type passe-haut ou en modifiant les seuils de visualisation par exemple. Pour restaurer l'état initial, cliquez sur Recharger. En fin de compte, une trentaine d'images de la séquence originale ont été sélectionné. Il reste a présent à les recentrer par rapport à la première image de la séquence, par exemple en utilisant la commande Registration des images planétaires (2)..., qui est très appropriée ici (voir la leçon 9). Enfin, les 30 images sont additionnées et un filtre du type passe-haut est appliqué (masque flou, traitement par ondelette, ...) à la somme de ces 30 images. Voici le résultat à partir d'images acquises dans des conditions de turbulence très médiocres (27/11/2000 à 22H50 TU, avec une lunette Takahashi FSQ-106 et une caméra Philips ToUcam Pro). L'extraction d'images d'un film AVI permet de séparer les images trichromes. Les trois séquences d'images doivent être traitées à l'identique. Une difficulté peu apparaître au moment de la sélection d'images : celle-ci n'agit que sur un canal à la fois. Si on fait la sélection sur le canal vert, les indices des images sont à conserver pour pouvoir isoler les images correspondantes dans les canaux rouge et bleu. Cette information existe sous la forme d'un fichier ayant pour nom SELECT.LST et qui est actualisé chaque fois que vous cliquez sur Sauver (l'usage du fichier SELECT.LST sera précisé lors de la leçon 18). Pour afficher le résultat utilisez, la commande TRICHRO à partir de la console et sauvegardez en utilisant la commande SAVEBMP. Par exemple : TRICHRO R V B Lorsque le but est d'enregistrer avec une Webcam des images pour une visualisation en couleur, il faut se rappeler que l'objectif d'origine a été retiré. Or celui-ci comporte parfois un filtre du type passe-bas qui a pour fonction de bloquer les photons infrarouges (c'est le cas de la ToUcam par exemple). En éliminant ce filtre et en déselectionnant la balance de couleur automatique (ce qui est recommandé pour avoir des résultats reproductibles), le dispositif ne fonctionne plus dans des conditions normales. Il apparaît un déséquilibre chromatique du fait que les micro-filtres disposés devant les pixels laissent passer plus ou moins le rayonnement infrarouge, alors qu'en temps normal il ne devrait pas y avoir d'infrarouge du tout. La parade est d'ajouter volontairement dans le trajet optique un filtre du type passe-bas, genre KG3 (encore appelé filtre froid). L'image en bas à gauche a été acquise avec une FSQ-106, une lentille de barlow Tele Vue 5x et une ToUcam utilisée sans filtre dans des conditions de turbulence atmosphérique extrêmement mauvaises (04/12/2000 à 20H35 TU). A droite, une image acquise quelques minutes après, mais en ajoutant un filtre KG3 dans le faisceau. Les couleurs de Jupiter deviennent plus "naturelle", moins délavée. Le fait d'ajouter un filtre froid limite aussi les effets dévastateurs du chromatisme sur certains réfracteurs exploités en conjonction avec une caméra CCD, ainsi que le chromatisme atmosphérique lorsque la planète est observée relativement proche de l'horizon.
Ci-après, quelques images réalisées avec la même instrumentation mais avec des conditions de turbulence allant de moyen à médiocre (compositage de 80 images à chaque fois le 08/12/2000) : La séquence ci-après a été réalisée avec un instrument plus conséquent : un télescope Takahashi CN-212 en configuration Cassegrain (212 mm de diamètre F/D=12.5) et une amplification par Barlow Tele Vue 2.5X (25/12/2000 vers 21H TU). La caméra est toujours un ToUcam Pro (compositages de 100 images extraites de films 500 images en utilisant la commande BESTOF - voir la leçon 18).
Le ciel profond n'est pas interdit aux Webcams, à condition d'être patient et de remplir son disque dur avec un nombre conséquent d'images. Prenons le cas de la ToUcam Pro de Philips : le temps d'exposition le plus long praticable actuellement est de 1/25 seconde. Par facile d'observer dans ces conditions des objets faibles. La figure ci-après est une image extraite d'un film AVI de la nébuleuse d'Orion faite avec cette Webcam au foyer d'une lunette Takahashi de 106 mm de diamètre (focale de 530 mm). On voit bien les étoiles du Trapèze mais la nébuleuse est à peine perceptible : Pour améliorer la situation 10 images ont été calculé qui représentent elles mêmes le cumul de 54 images extraites de films AVI distincts. Détail important, le télescope a été légèrement dépointé entre chaque prise de vue AVI de manière à réduire l'effet des défauts systématiques du CCD. Des images du signal thermique (ou offset) ont été acquises en obstruant l'ouverture du télescope et le prétraitement a été effectué de manière tout à fait traditionnelle (voir la leçon 6). L'image ci-après montre une visualisation à haut contraste du signal d'obscurité (le gain de la caméra a été poussé au maximum et n'a pas été modifié durant toute la session d'observation, c'est important). Cette image est en fait la somme médiane d'un film AVI contenant une cinquantaine de clichés (utilisation de la commande MEDIAN2). On constate de faibles points chauds et surtout, une trame verticale bien marquée. Cependant comme cette dernière semble relativement constante en fonction du temps, le prétraitement est possible. Ci-après la nébuleuse M42 après du traitement. Le signal de noir a été retiré de chacune des images élémentaires, puis les 10 images, représentant le cumul de10 films AVI contenant 54 clichés chacun, ont été additionnées après registration (commande REGISTER). Les extensions de M42 sont a présent bien visibles. On note que la trame verticale a quasiment disparue. Le temps de pose équivalent est de l'ordre de 22 secondes. La figure suivante est un agrandissement de la précédente, avec une visualisation facilitant l'observation de la région du trapèze. Cette image montre des étoiles de magnitude 12.5 pour un temps de pose cumulé de 22 secondes. On n'ose imaginer le résultat s'il était possible de poser ne serait-ce qu'une seconde par image élémentaires avec cette caméra ! Un des problèmes des caméras Webcams est qu'elles présentent souvent un bruit de lecture relativement important. Une cause potentielle du bruit provient de problèmes de masses électrique et du rayonnement électromagnétique ambiant. Les trois images suivantes montrent le bruit d'une caméra ToUcam Pro lorsque le gain est poussé au maximum (une telle image est réalisée en plaçant la caméra dans l'obscurité totale). A gauche, le cable de liaison USB entre la caméra et l'ordinateur côtoie une source de rayonnement importante (le transformateur qui alimente le télescope probablement) et on observe un fort parasitage. Le bruit est de 34.6 ADU RMS (mesure avec la commande Statistique du menu contextuel - paramètre Sigma). Au centre, le cable est disposé de manière à éviter au mieux le rayonnement électromagnétique (il a suffit de le déplacer de quelques dizaines de centimètres). Le bruit mesuré est de 18.6 ADU RMS. A droite, le même cable USB est entouré sur toute sa longueur par du papier aluminum d'emballage de produit alimentaires. En outre, c'est très important, le papier aluminium est mis en contact mécanique (et électrique) avec la structure du télescope. La caméra elle même est recouverte de papier métallique (une sorte de papillote !). Le bruit n'est plus à présent que de 12.1 ADU RMS, soit une diminution de près d'un facteur 3 par rapport à la situation pire rencontrée. Bref, une opération simple mais très rentable !
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