Leçon 9 : Le traitement des images planétaires

Téléchargez le fichier LECON9.ZIP et décompressez dans un répertoire de votre disque dur, par exemple le répertoire C:\JOB.

Ce faisant vous avez à votre disposition 10 images de la planètes Jupiter ayant pour nom JUP1.PIC, JUP2.PIC, ... JUP10.PIC (prise de vue le 20/09/1994 avec la lunette de 130 mm du T60 du Pic du Midi). Les images sont prétraités : le signal d'offset de la caméra CCD a été retiré et elles ont été divisé par une l'image d'une plage du lumière uniforme (le flat-field). Le signal thermique est quand à lui généralement considéré comme négligeable avec des images planétaires compte tenu du bref temps de pose pratiqué.

Examinez la première image de la séquence :

Les contraste est relativement faible sur cette image et les détails peu visibles. Pour améliorer la situation nous allons additionner les 10 images de la séquence afin de disposer d'un document ayant un fort rapport signal sur bruit. Puis nous travaillerons sur cette dernière image pour accroître le contraste.

Avant d'additionner les images il faut les recentrer par rapport à la première image de la séquence. Les images planétaires posent un problème bien particulier par rapport aux images du ciel profond. Une excellente technique consiste à exploiter la fonction d'intercorrelation de couples d'images. La commande Registration des images planétaires (1) ... du menu Traitement réalise cette opération (assez complexe et qui fait notamment appel à la Transformée de Fourier).

Mais avant toute chose il est très important de conditionner les images à traiter en normalisant le fond de ciel des images planétaires à une valeur nulle. Avec la souris définissez un rectangle dans une zone de l'image non occupée par le disque planétaire :

Puis invoquez la commande Normalisation de l'offset d'une séquence... dans le menu Traitement. Remplissez les paramètres de la boite de dialogue de manière habituelle. Précisez en particulier que la valeur de normalisation est 0. La nouveauté est qu'il faut cocher l'option Sur une zone. De la sorte le calcul de normalisation sera effectué uniquement à l'intérieur la zone sélectionnée de l'image, c'est à dire à coup sur en utilisant des pixels qui appartiennent bien au fond de ciel et qui dont l'intensité n'est pas affectée par la planète .

La commande précédente a produit une nouvelle séquence I1.PIC, I2.PIC,... I10.PIC dans laquelle le niveau du fond de ciel est ramené à une valeur très proche de zéro (vous pouvez le vérifier en promenant la souris sur le fond).

A présent définissez avec la souris une zone au centre du disque de Jupiter dans la première image de la séquence (l'image I1.PIC). La taille du rectangle importe peu, l'important est que son centre désigne approximativement le centre du disque de la planète :

Vous pouvez maintenant lancer la commande Registration des images planétaires (1) ... Remplissez les paramètres de la boite de dialogue de la manière suivante :

Le principe devrait être bien assimilé : la séquence d'images à traiter est I1.PIC, I2.PIC, ... I10.PIC et la séquence registrée sera J1.PIC, J2.PIC, ... J10.PIC. Notez la valeur du paramètre Taille de la sous-image. C'est la dimension de la sous-image dans laquelle IRIS va effectuer le calcul d'autocorrélation. Cette sous-image est par ailleurs centrée sur la zone que vous avez définie avec la souris avant de lancer la commande. La taille de la sous-image est obligatoirement une puissance de deux (c'est à dire ou 64, ou 128, ou 256 ou 512...). Cette dimension doit être juste supérieure au diamètre du disque planétaire (dans le cas de Saturne prendre en compte les anneaux). Ici le disque a un diamètre d'environ 100 pixels et la taille appropriée pour la sous-image est 128.

Nota : l'option Spline de la boite de dialogue Registration planétaire... permet de substituer à la traditionnelle interpolation bi-linéaire lors de la registration, une interpolation du type spline. Cette dernière permet un léger gain de résolution en supprimant une bonne partie de l'effet de lissage de la technique bi-linéaire. Cliquer ici pour voir un exemple.

Faite OK. A titre d'exercice, pour vous assurer que le recentrage c'est bien passé, effectuez la soustraction de l'image J1.PIC et de l'image J10.PIC : le résidu doit être faible et trahit uniquement l'impact de la turbulence atmosphérique qui déforme le disque planétaire ou des défauts résiduels de correction flat-field :

La commande dans la console équivalente à registration planétaire ci-dessus est :

PREGISTER   I   J   128   10

Vous pouvez à présent additionner les 10 images ayant pour nom générique J. Faite le (commande Addition d'une séquence...), puis déterminez une statistique sur la zone couverte par le disque planétaire dans l'image résultat (commande Statistiques du menu contextuel).

Astuce : la statistique globale de l'image peut être obtenu en tapant simplement dans la console la commande STAT.

Le résultat montre un problème très sérieux. Il est vraiment important d'être en mesure de le dénicher : les pixels les plus intenses atteignent le niveau 32767, qui est le maximum autorisé sous IRIS. Cela signifie très probablement que des intensités plus forte existent après l'addition des 10 images, mais ces valeurs ont été écrêtées à la valeur 32767. En d'autre terme, de l'information a été perdu au centre du disque de Jupiter.

Pour résoudre le problème il faut se résigné à multiplier chaque image individuelle par une constante de valeur inférieure à 1 de manière à ce que leur somme ne dépasse pas 32767. Pour cela utilisez la commande Multiplier une séquence par une constante... du menu Traitement. On décide que le constante est 0,8 :

L'addition des 10 images de la séquence K montre que le niveau maximum atteint est de l'ordre de 27000. L'image compositée occupe bien la dynamique avec un peu de marge avant la saturation. Tout va bien à présent. Sauvegardez le résultat sous le nom JUP.

Le signal dans l'image JUP.PIC est considérablement plus élevée par rapport à une image brute. Les détails ne sont pas pour autant au rendez-vous. Corrigeons cela en exécutant la commande Masque flou... du menu Traitement :

Le paramètre Sigma défini la finesse des détails dans l'image traitée. Plus sigma est petit, plus les détail sont fins, mais en même temps plus le bruit augmente. Il ne faut donc pas chercher à voir des détails au delà de ce qu'a pu fournir l'instrument de prise de vu ! Le paramètre Coefficient fixe le contraste du résultat. Plus ce coefficient est élevée plus le contraste est important. Les bons paramètres sont à estimer par essais successifs, il n'y a pas vraiment de règle. Les valeurs indiquées ici sont typiques. Voici le résultat :

Il est possible d'utiliser à ce stade des outils qui accentues plus fortement encore les contrastes comme par exemple l'algorithme de Van-Cittert (qui fait partie des algorithmes dits de déconvolution). Rechargez l'image JUP.PIC, puis faites depuis la console :

VANCITTERT  7  20

Remarquez l'apparition d'artefact au bord du disque : se sont les limites de ce type de techniques, dont il ne faut surtout pas abuser !

IRIS propose une seconde méthode pour effectuer le registration des images planétaires qui repose sur le calcul du cercle qui épouse au mieux le contour de l'objet. Il faut pour cela donner au programme une valeur d'intensité dans l'image qui correspond au niveau du contour. Ce niveau doit être choisi avec soin : il doit être suffisamment bas de manière à ce que l'essentiel du disque de la planète soit inclue à l'intérieur du contour, mais en même temps il ne doit pas être si bas que le contour est tracé sur des artefact proches du fond de ciel ou sur un satellite voisin (dans ces conditions IRIS retourne le message d'erreur "Fenêtre trop petite"). La commande en ligne CIRCLE peut vous aider à définir le niveau du contour. Chargez l'image JUP1, puis définissez une large zone de sélection autour du disque de la planète et enfin lancez la commande CIRCLE depuis la console avec un paramètre qui est le niveau de contour testé :

IRIS trace automatiquement le contour (celui-ci est calculé en utilisant uniquement les pixels situés dans la zone de sélection). Dans l'exemple on a choisi l'intensité 1500, qui est un bon choix ici (ne pas hésité à modifier la valeur du paramètre pour jauger son impact). IRIS retourne la position du centre du disque (coordonnées X et Y) ainsi que son rayon pour un contour d'intensité 1500. La méthode fonctionne bien sur des objets présentant un disque de révolution : Jupiter, Mars à l'opposition. En revanche pour Saturne il reste préférable d'utiliser la méthode d'intercorrélation. Le recentrage par le calcul du pourtour du disque est particulièrement efficace pour certaines images du Soleil (voir la leçon 11).

La commande Registration des images planétaires (2) ... du menu Traitement exploite l'algorithme du contour pour recentrer les images. Dans la situation du traitement de la séquence JUP vous pourriez faire par exemple (notez que IRIS ne demande pas la définition d'une zone de calcul, c'est toute l'image qui est utilisée pour cela) :

Cette même commande depuis la console s'écrit :

CREGISTER  JUP   I  1500  10

Pour finir cette leçon, quelques recommendations sur l'acquisition et le traitement des images planétaires.

L'échantillonnage de l'image est un paramètre important pour profiter au maximum des possibilités de l'instrument lors des moments de calme de l'atmosphère. On trouve aujourd'hui des instruments compacts sous la forme de lunettes astronomiques courtes de très haute qualité (utilisation de verre spéciaux). Cependant la focale modeste de ces instruments et leur faible diamètre, de l'ordre de 100 à 130 mm, rendent délicat un fort agrandissement de l'image. L'image de Saturne ci-dessous a été réalisée avec un instrument de ce type : une lunette quadruplet flurorite Takahashi de 106 mm de diamètre (FSQ-106). Une Barlow 2.5x a été utilisée pour produire une focale de 2270 mm en utilisant les bagues allonge adéquates. La caméra est une Audine exploitée en binning 1x1 et en mode demi-trame (logiciel Pisco pour l'acuisition). Un filtre V limite la bande spectrale du CCD. Le temps de pose est de 0.5 seconde. L'échantillonnage est de 0.82"/pixel alors que le pouvoir séparateur théorique de la lunette se situe vers 1.3". Pour échantillonner correctement l'image il aurait fallu qu'un pixel couvre un champ angulaire plus petit que 1.3/2=0.65" afin de répondre au critère de Nyquist. L'image de Saturne est donc sensiblement sous-échantillonnée (sa petitesse est bien visible sur la vue de gauche qui est une image brute). Pour arriver au résultat de la figure de droite il ne faut pas hésiter à compositer un grand nombre d'images (50 ici). C'est une règle d'or en imagerie planétaire : ne jamais se contenter d'une ou deux images du même objet (attention malgré tout à la rotation de la planète sur elle-même, le temps d'acquisition total de la séquence doit être suffisamment bref pour que cette rotation n'emmène pas de détérioration de la résolution).

Une étape importante est le compositage des images de la séquence. Pour Saturne c'est un compositage du type drizzling qui a été adopté (commande Drizzle... du menu Traitement). Cette méthode n'amène qu'un gain faible de résolution dans le cas présent, mais évite surtout de dégrader les images lors de la phase de recentrage qui a tendance à produire un lissage d'autant plus critique que les images sont mal échantillonnées au départ. Une autre alternative, mais légèrement moins performante, serait d'agrandir les images avant le recentrage. Le facteur d'agrandissement après compositage drizzling est de 2. Le traitement est ensuite poursuivi en utilisant un procédé de déconvolution simple : l'algorithme de Van-Cittert (déjà vu plus haut). On réalise 8 itérations avec un FWHM mesuré sur le satellite Titan. Enfin, un léger masque flou est appliqué pour rendre le résultat agréable à regarder (noter que l'on est proche de l'opposition et que l'ombre de la planète se projète pratiquement symétriquement par rapport au globe) :
 

 

 


Les images de Jupiter ci-après ont été obtenues la même nuit que celles de Saturne et avec la même instrumentation au travers de filtres BVRI afin de constituer une trichromie (compositage de 7 poses en B, de 17 poses en V, de 14 poses en R et de 11 poses en I). Les temps de poses respectifs en mode demi-trame en B, V, R et I sont de 1.00, 0.25, 0.15 et 0.25 secondes.

Une moyen simple d'améliorer la résolution lorsqu'on dispose d'une séquence de nombreuses images est de sélectionner les meilleures d'entre-elles avant le compositage. Il faut procéder en deux temps :

  1. Une nouvelle séquence à partir des images brutes est créée en appliquant un filtre qui accroît le contraste (l'idéal est d'utiliser la commande Masque flou d'une séquence... du menu Traitement). On produit une séquence dite de contrôle.
  2. On utilise ensuite la commande Sélection d'images... du menu Visualisation :

Dans cet exemple on examine successivement la séquence de 30 images brutes VVV-1...VVV-3. La série d'images sélectionnée a pour nom générique R (R1, R2, R3...). En plus, pour améliorer le contrôle visuel de la qualité des images, celui-ci n'est pas fait sur la séquence brute mais sur une séquence de contrôle I (I1, I2, I3,...) qui diffère des images brutes par le fait qu'on lui a appliqué un filtre de rehaussement de contraste comme expliqué plus haut. Cependant, chaque fois que l'on sélectionne une nouvelle image (bouton Sauver) ce n'est pas l'image de la séquence I qui est sauvegardée, mais bien une image brute de la séquence VVV-.

Le résultat des traitements est montré ci-dessus : en haut à gauche l'image bleu, en haut à droite l'image verte, en bas à gauche l'image rouge et en bas à droite l'image infrarouge.

La commande TRICHRO permet d'afficher Jupiter en vrais couleurs (au préalable il faut ajuster l'équilibre chromatique en multipliant les images par des coefficients permettant d'amener au même niveau l'intensité de détails considérés comme neutre spectralement).

L'image ci-après montre une composition en utilisant les images B, R et I :