Stage de spectrographie - Session 1 (1/3)

INITIATION A LA SPECTROGRAPHIE


Objet du stage : apprendre à construire un spectrographe, à acquérir des spectres des objets du ciel, à les traiter et à les exploiter.

Pré-requis pour suivre ce stage : savoir utiliser un télescope, avoir fait quelques images CCD et être passionné.

Animatrice du stage : Aude Peltier.

Les stagiaires : Christian, Raymond et Alain.

NB : toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existé serait pure coïncidence !


A propos des stagiaires :

Christian : il a lu beaucoup de livres sur l'astronomie. Il a fait le circuit de l'observation à l'oeil nu à l'image numérique avec une webcam. Depuis peu de temps il utilise une caméra CCD refroidie pour l'imagerie du ciel profond. Ces premières images le satisfont et il est émerveillé par les possibilités des détecteurs électroniques. Il possède un télescope de 200 mm du type LX200 pour ne pas trop s'embêter avec le pointage. Il perçoit l'importance de la spectrographie en astronomie, mais a du mal à imaginer que des amateurs puissent aborder un sujet aussi technique. Pour lui c'est une activité pour les matheux et il considère qu'il n'a pas le niveau. Mais il est curieux de tout, alors...

Raymond : grand bricoleur devant l'éternel. C'est la technique qui l'intéresse le plus. Il se sert peu de la lunette de 128 mm de diamètre que ça femme lui a offerte. Il faut dire qu'il observe en ville, ce qui, selon lui, limite singulièrement le champ d'observation. Aussi, en plus des aspects techniques, il est motivé, car il a entendu dire que l'on peut faire du bon boulot en spectrographie, même lorsque l'on est submergé par la pollution lumineuse.

Alain : Il a pas mal bourlingué parmi les galaxies avec son beau télescope de 250 mm, mais essaye de donner un autre sens à ces observations astronomiques. Il aimerait que ces observations aient une utilité en dehors de sa propre satisfaction personnelle. Pourquoi ne pas travailler de concert avec d'autres amateurs, où même des professionnels ce dit-il. Il considère la spectrographie comme un terrain vierge à explorer et cela le motive pas mal.

Aude - Bienvenu à ce stage !

Je vais considérer que ce stage est pour vous l'occasion d'un premier contact avec cette discipline l'on appelle "spectrographie". Vous s'avez s'en doute qu'un spectrographe est un appareil qui analyse la lumière en la décomposant dans ces différentes couleurs pour former un "spectre coloré". L'analyse spectrale des astres est cruciale, car c'est le seul moyen d'étudier à distance leur composition chimique et les conditions physiques qui y règnent. Je reviendrais un petit peu là-dessus au cours du stage. Mais ici, mon approche sera avant tout pratique. Ainsi, je vous propose de construire un spectrographe très simple pour vous familiariser vite et bien avec une technique que je crois passionnante. Je vais bien sur aussi vous montrer comment on se sert de ce spectrographe. Cela vous convient ?

Christian - C'est un programme chargé, mais ça me va !

Raymond - On est là pour apprendre un maximum de chose, c'est tout bon.

Alain - No problemo.

Aude - Mais avant tout, votre présence ici me fait bien  sur pensée que vous avez entendu parler de spectrographie. Qu'est-ce qui vous motive et avez-vous déjà concrètement pratiqué cette discipline ?

Christian - Absolument pas ! J’ai lu dans les revues d’astronomie et les livres que la spectroscopie est une technique fondamentale en astronomie pour comprendre le fonctionnement des astres. Elle est même fondatrice, je crois. Je suis ici, car je ne veux pas passer à côté, cela doit faire partie de mon bagage d'honnête astronome de comprendre de quoi il s’agit. J’ai commencé l’astronomie en mettant l’œil à l’oculaire, puis une webcam au bout du télescope. Il y a deux ans, j’ai acheté une caméra CCD qui m’a permis de faire quelques images du ciel que je considère comme honnêtes avec mon LX200 de 8 pouces. Que les amateurs puissent réaliser des spectres comme les professionnels m’épate un peu ! A priori, je ne pense pas avoir le niveau en maths pour me lancer dans une telle activité et je ne pense pas être en mesure de comprendre ce que je vais faire avec un spectrographe. Mais bon, je veux bien voir...

Raymond - Rien de concret non plus en ce qui me concerne. J’avoue être attiré par les techniques assez originales qui semblent entourer la spectroscopie. J’aime bien la bidouille, construire des appareils et le traitement d'images. Mais en même temps, ce que j’ai pu lire sur le Web m’a fait un peu peur. C'est tout de même assez compliqué la spectro, bourré de termes assez ésotériques. Bref, est-ce pour moi une voie à prendre, alors que finalement, cela ne fait qu’un an que je pratique l'observation avec appareil photo numérique puis une caméra CCD pas chère avec mon télescope de 200 mm ? J'aimerais bien construire un spectrographe, mais je veux me rendre compte des difficultés. Ce qui me motive aussi c'est que j’observe en ville depuis un balcon et j’ai entendu dire que la spectroscopie pouvait s’accommoder de conditions aussi médiocres.

Alain - Je pratique depuis 5 ans l’observation CCD des planètes et du ciel profond. Bien sûr, je sais que je suis loin d’avoir fait le tour du sujet, mais je vois dans mon entourage des gens qui font les mêmes images que moi, parfois meilleures, et je me dis : à quoi bon refaire ce que les autres ont fait ? J’ai tendance à chercher un but dans l’observation au-delà du simple aspect contemplatif d’une belle image de galaxie. Si mes observations peuvent servir à faire avancer la "science", même très modestement, cela ajouterait du piquant lorsque je pointe le télescope vers le ciel. La spectroscopie est je crois un domaine vierge pour les amateurs et j’ai le sentiment que des découvertes y sont possibles. Cependant, tu vas vraiment devoir me convaincre qu'il est possible de se satisfaire d'une simple courbe alors que le ciel est truffé de belles galaxies spirales et d’astres merveilleusement colorés !

Si j'ai bien compris, tu vas commencer par nous montrer comment bricoler un spectrographe ?

Aude - C'est cela. Bien sur par un spectrographe ultra performant, mais suffisant pour vous permettre de mettre sérieusement le pied à l'étrier. Allons-y. L'élément de base du spectrographe est un composant optique capable de disperser la lumière. Les prismes de verre ont cette propriété. On exploite dans ce cas le principe de la réfraction de la lumière. C'est par exemple la réfraction qui est responsable de l'apparition d'un arc-en-ciel par temps de pluie. Les prismes sont cependant mal commodes à l'usage dans un spectrographe, car il n'est pas facile de maîtriser le pouvoir de dispersion. Ces bouts de verres dévient  la lumière en fonction de ça couleur, c'est le but recherché, mais ils le font avec une efficacité assez médiocre, aussi l'instrument peut devenir vite encombrant et le traitement numérique des spectres assez complexe. On leur substitue souvent avec bonheur des réseaux à diffraction. Un réseau à diffraction est une pièce optique, généralement plane, sur laquelle est gravé un grand nombre de sillons. C'est la diffraction de la lumière sur ces sillons qui provoque l'apparition d'un spectre. Je vous montre de suite le réseau que nous allons utiliser :

 

Christian - Mais c'est une simple diapositive ma parole !

Aude - Disons que le fabricant du réseau utilise le cache d'une diapositive pour le maintenir. Dans le cas présent, on a affaire à une très fine épaisseur d'un plastique spécial transparent sur lequel est gravée une grande densité de traits parallèles.

Raymond - Mais enfin, ce n'est qu'une pièce de plastique transparente, je ne vois rien de particulier ?!

Aude - Il faut bien sûr que la lumière traverse la diapositive pour parvenir jusqu'au détecteur qui va capturer l'image du spectre. C'est la première fonction, et voilà pourquoi notre réseau est transparent. Mais en même temps, il faut lui donner la propriété de dévier différentiellement les couleurs de ladite lumière qui le traverse. C'est pour cela qu'une image au microscope révélerait de fins sillons parallèles qui couvrent toute sa surface. Le mécanisme optique qui entre en jeu est la "diffraction" de la lumière, d'où le nom donné. Prenez pour acquis le résultat. Dans le cas présent notre réseau comporte 100 traits par millimètre.

Raymond - Tu veux dire que les traits font 1/100 = 0,01 mm de large ?

Aude - C'est exact. Comme je l'ai dit, les traits sont impossibles à voir à l'oeil nu bien sur, ils sont trop fins. En réalité, vous connaissez déjà le résultat du mécanisme de la diffraction de la lumière dans la vie courante. Il suffit d'examiner la lumière en réflexion sur un disque CD ou DVD. Vous voyez de belles irisations de couleurs qui ne sont rien d'autre que des spectres. Leur présence est provoquée par le très fin motif gravé sur la surface du disque, qui code l'information sonore ou vidéo, et qui s'enroule avec un pas serré. Dans le cas du disque CD, le "réseau" travaille en réflexion, alors que notre composant sur diapositive travaille en transmission - on voit à travers autre dit. Que le réseau soit à réflexion ou à transmission, les phénomènes physiques mis en jeu sont les mêmes.

Faisons une expérience : mettez le réseau devant votre oeil et regardez une lampe du bureau. Dites-moi ce que vous voyez ?

Christian - La lampe est visible au centre, mais il y a tout plein de couleurs qui l'accompagnent...

Aude - Ces couleurs forment un dégradé continu du bleu au rouge. C'est cela que l'on appelle un spectre. Le réseau a décomposé la lumière blanche provenant de la lampe en une infinité de couleurs que l'oeil perçoit comme un arc-en-ciel.

Raymond - Mais ce n'est tout de même pas un réseau qui produit l'arc-en-ciel que je peux apercevoir par temps de pluie ?

Aude - C'est un autre mécanisme qui produit la dispersion de la lumière en effet. La lumière du Soleil ce réfracte dans les gouttes d'eau, un peu a la manière de ce qui advient dans un prisme. C'est assez complexe et je n'entrerais pas dans les détails, mais c'est vrai que c'est beau !

  

Regardez ce petit dessin qui précise ce qu'est la dispersion de la lumière :
 

Alain - Je connais. La lumière blanche est en fait le mélange de toutes les couleurs !

Aude - tout à fait, et le spectrographe est l'outil qui nous permet de mettre cela en évidence.

Christian - Si j'additionne toutes les couleurs du bleu au rouge j'obtiens du blanc. C'est cela ?

Aude - Tout juste !

Alain - Mais dans l'expérience de la lampe de bureau, il y a quelque chose qui m'intrigue... Il me semble apercevoir plusieurs spectres en même temps ?

Aude - Bien vu. C'est la conséquence d'une propriété importante des réseaux à diffraction. Ils ont en effet la fâcheuse habitude de produire plusieurs spectres distribués de part et d'autre de la source de lumière originelle.

Raymond - Pourquoi tu dis la "fâcheuse habitude". Moi je trouve cela plutôt jolie tous ces spectres !

Aude - Raymond, ne te réjouit pas si vite. Tu déchanteras lorsque devant le télescope il te faudra acquérir le spectre d'une faible étoile. Je m'explique. La lumière qui arrive de la lampe est répartie dans plusieurs spectres, soit. Le problème est que nous ne pourrons exploiter en pratique qu'un seul de ces spectres. La lumière envoyée dans les autres spectres est donc perdue pour nous. Nous gaspillons ainsi une précieuse information. Cela peut t'empêcher d'observer des astres faibles si on n'y remédie pas.

Christian - Je vois. Y a-t-il une solution pour améliorer l'efficacité du spectrographe ?

Aude - Regardez bien les différents spectres de notre lampe de bureau. Celui qui se trouve juste en dessous de l'image blanche de la lampe est bien plus intense que les autres. Ce n'est pas un hasard. Le fabricant a conçu sont réseau avec des sillons qui ont un profil spécial dont la propriété est d'envoyer de manière privilégiée un maximum de lumière dans un seul spectre. On appelle cela le "blaze" du réseau.

Raymond - "blaze", c'est un nom bizarre ?

Aude - J'admet. Ça vient de l'anglo-saxon, et c'est assez intraduisible en français. En gros, cela signifie que le réseau est capable de "diriger" une grande partie la lumière dans une direction particulière. J'aime bien personnellement faire l'analogie avec un effet de miroitement de la lumière sur une surface plane polie.

Alain - Donc, je suppose que c'est ce spectre intense que nous allons utiliser ?

Aude - Oui, nous verrons vite un exemple concret sur des étoiles. Mais pour l'instant, je voudrais attirer votre attention sur le fait que l'on observe une image normale et blanche de la lampe, en plus des spectres. Cela signifie qu'une image non dispersée est transmise par le réseau. Elle est simplement moins intense que ce que vous voyez sans le réseau devant l'oeil. Il n'empêche que cette lumière non dispersée, tout comme les spectres secondaires, participe à faire chuter le rendement du spectrographe. Heureusement, un réseau "blazé" peu concentrer 60% ou plus du flux lumineux incident dans un seul spectre. Pour s'y retrouver, on donne un numéro aux spectres. L'image directe, non dispersée, est appelée l'ordre zéro. De part et d'autre on trouve les ordres 1, 2, 3... et -1, -2, 3,... J'ai indiqué ces ordres dans l'image de la lampe. L'attribution du signe plus ou moins pour les spectres situés d'un certain coté par rapport à l'ordre zéro est arbitraire

Raymond - Qu'elle est l'efficacité du réseau sur diapositive ?

Aude - Il concentre près de 50% de la lumière incidente dans le spectre d'ordre 1, ce qui est extrêmement honorable pour un réseau économique.

Christian - Economique, c'est-à-dire ?

Aude - Il coûte à peine 25 Euros. On peut se le procurer sous la référence 212 022 01, auprès de Jeulin, une société spécialisée dans la distribution de matériel pour l'Education Nationale. Ce composant optique de bonne qualité est en fait une véritable aubaine. Le rapport qualité-prix est garanti !

Christian - Et l'adresse de Jeulin ?

Aude - Il peut être acheté sur catalogue. Voir le site Internet : www.jeulin.fr.

Raymond - Parfait, mais comment faire pour enregistrer le spectre ?

Aude - C'est la grande question. Je vais vous expliquer la méthode la plus simple. Il y en a d'autres, plus sophistiquées, qui donneront bien sur des résultats meilleurs. J'en dirais un mot à la fin du stage. Je vous inviterais aussi à explorer d'autres montages de spectrographe lors de la prochaine session de ce stage. La technique simple dont je vais vous parler à présent sera déjà efficace pour identifier certaines particularités remarquables des spectres des objets du ciel. Vous pourrez même faire un peu d'astrophysique et des mesures qui peuvent avoir quelques utilités pour la communauté scientifique.

Mais avant d'aborder le vif du sujet, je dois préciser deux notions : la dispersion spectrale et la résolution spectrale.

Analysez les deux spectres simulés suivants, dans lesquels j'ai fait l'hypothèse que seulement quelques couleurs sont présentes :

Par rapport au spectre du haut, le spectre synthétique en bas couvre une étendue linéaire plus grande. Autrement dit, la "dispersion spectrale" est plus importante dans le spectre du bas que dans le spectre du haut.

Attention, je vais parler un peu chiffres maintenant car la notion de couleurs est fortement suggestive. On connaît même des gens qui ont du mal à les distinguer, et c'est même le cas pour nous tous la nuit à cause de la structure de la rétine de l'oeil. Nous allons donc parler comme les physiciens. Ceux-ci préfèrent accoler aux vagues couleurs une valeur numérique, qui est une unité de longueur appelée "longueur d'onde". Par exemple, la longueur d'onde pour le rouge est en gros de 0,00065 millimètre. Pour le vert elle vaut 0,00055 millimètre et pour le bleu profond 0,00045 millimètre. Les valeurs correspondantes en nanomètre sont 650, 500 et 450 nm. Les astronomes utilisent aussi l'angström, une unité désuète, mais très largement répandue en astronomie. Dans cette unité, les valeurs énumérées précédemment sont respectivement 6500, 5500 et 4500 Å (la lettre Å est le symbole de l'angström).

Raymond - Tu manipules là des longueurs vraiment très petites. Je ne suis pas habitué à cela en mécanique ! Peux-tu nous dire en deux mots ce qui ce cache derrière ?

Aude - Une des représentations possibles de la lumière est une onde sinusoïdale qui se propage à 300 0000 km/s approximativement dans le vide. Voici deux ondes :

        

La longueur d'onde est la distance qui sépare deux creux ou deux bosses successives. La longueur d'onde est généralement représentée par la lettre grecque l (prononcer "lambda"). Dans la figure de gauche, la longueur d'onde est courte, ce qui pour l'oeil se traduit par une impression de couleur bleue. A l'inverse, la longueur d'onde de la sinusoïde de droite est longue et les rayons lumineux correspondants donnent la perception du rouge. Faire un spectre c'est en fin de compte séparer les différentes longueurs d'onde qui composent la lumière.

Alain - Tu as aussi parlé de "résolution spectrale" tout à l'heure ?

Aude - J'y viens. Notez dans les représentations précédentes comment les quelques couleurs présentes dans le spectre se chevauchent plus ou moins partiellement. La superposition empêche de bien distinguer les couleurs entre elles : elles ne sont pas séparées. On peut faire l'analogie avec l'observation d'une étoile double dont les composantes sont serrées. Au télescope, les images de ces deux étoiles seront peut-être si proches que leurs disques apparents se recouvriront. Par intermittence la duplicité sera peut-être visible, mais si la puissance du télescope est insuffisante, les deux étoiles n'en feront qu'une : elles ne seront plus séparées. Pour résoudre une étoile double ont peut-être amené à utiliser un fort grossissement. C'est équivalent à augmenter la valeur de la dispersion en spectrographie. Mais un autre moyen, complémentaire, consiste à utiliser un télescope de plus grand diamètre de manière à avoir des taches d'Airy des étoiles plus petite taille. Cela facilitera la séparation des deux composantes. Cette notion de résolution existe aussi en spectrographie. Regardez les deux spectres synthétiques suivant :


 

En haut, la lumière provient d'une source de large étendue, un peu comme notre lampe de bureau. En bas, pour empêcher la superposition, on s'est arrangé pour que la lumière passe au travers d'un petit trou placé juste en avant de la lampe de bureau. Dans ce cas, on voit une série de taches de couleurs discrètes bien séparées. Ces taches sont des images du trou, et non pas de la lampe. Cet artifice sur le chemin de la lumière a permis d'augmenter la résolution de notre spectrographe visuel.

Si je cesse de parler de couleurs, vous l'avez compris, je pense, l'artifice du trou nous permet de mieux distinguer les longueurs d'onde dans la lumière qui est analysée.

En pratique, nous verrons plus tard que cela équivaut à former des images des étoiles bien nettes sur le capteur, ou a adopter des spectrographes plus sophistiqués où on fait physiquement passer la lumière à analyser - celle d'une étoile par exemple - dans un petit trou, ou mieux, une fente étroite.

Alain - Oui, mais des spectres comme tu les montres, avec quelques couleurs, cela n'existe pas ! C'est un cas d'école ! Quand je regarde un arc en ciel, je ne vois pas de points plus ou moins gros !

Aude - Détrompe toi Alain, il existe des sources qui émettent de la lumière dans des couleurs très précises que l'on appelle des raies. Leur longueur d'onde est caractéristique de la nature chimique de la matière dont est faite la source, des conditions physiques d'émission de la lumière ou encore des événements qui surviennent lors du trajet des rayons lumineux jusqu'à l'observateur. La position des raies dans le spectre est une véritable empreinte digitale de la composition chimique de l'objet et elle est unique. La "signature" spectrale de l'hydrogène ne sera pas celle du fer ou de l'azote par exemple. L'éclairage urbain des villes par des tubes fluorescents produits une lumière dans laquelle on trouve des raies spectrales brillantes isolées, on dit aussi des raies en "émission". Elles sont spécifiques d'un gaz, comme la vapeur de mercure ou le sodium, qui est emprisonné dans l'ampoule du lampadaire. Je montrerai un exemple à la fin du stage. Mais il est vrai qu’en même temps, dans certaines conditions, que l'on trouve à la surface des étoiles, mais aussi dans les lampes incandescentes à filament de tungstène par exemple, la lumière émise montre un enchaînement continu toutes les nuances de couleurs. On parle de spectre "continu".

Le spectre des étoiles est donc du type continu, mais en des endroits précis et très localisés, il est possible de discerner des absences de couleurs. Ce sont nos fameuses raies spectrales, dont ont dit qu'elles sont en absorption, comme si un processus physique avait éliminé des couleurs particulières. L'absorption a généralement lieu dans la chromosphère de l'étoile, une sorte d'atmosphère au dessus de l'éblouissante photosphère, cette dernière étant à l'origine du spectre continu. Ces brisures du spectre à des longueurs d'onde précises trahissent ici encore l'existence de tels ou tels éléments chimiques dans l'étoile. Mais attention, c'est souvent complexe. Par exemple, un élément chimique particulier peu être présent dans l'atmosphère d'une étoile, mais ne pas montrer les raies spectrales correspondantes, tout simplement du fait que les conditions physiques du milieu ne sont pas appropriées. L'allure du spectre est notamment fortement assujettie à la température de l'étoile. Même le continuum de l'étoile, ce trait continu des couleurs, a une allure fortement liée à la température de surface de l'astre : s'il est chaud, il émettra plus de rayons bleus que de rayons rouges. Ce sera l'inverse avec une étoile froide. La pression des gaz dans l'étoile est un autre exemple de paramètre qui modèle l'aspect d'un spectre.

Voici un exemple de spectre continu, avec des raies en absorption et même une raie en émission, absorption et émission pouvant parfaitement coexister dans le spectre de certaines étoiles.

Raymond - Si je comprends bien, on jugera la qualité d'un spectrographe à son aptitude à séparer les raies spectrales ?

Aude - Tout à fait, cela permettra d'identifier par exemple plus d'éléments chimiques ou aidera à comprendre les conditions physiques de l'étoile. Mais la course à la meilleure résolution ne doit pas toujours être le but ultime. Au fur et à mesure que la résolution augmente il faut apporter plus de lumière au spectrographe pour que les spectres soient détectables. Rappelez-vous comment nous avons accru la résolution tout à l'heure : en faisant passer la lumière de la lampe de bureau dans un petit trou. Si la taille de ce dernier devient excessivement petite, il ne passera plus de lumière ! Pour observer des astres faibles, il faut souvent savoir renoncer à une haute résolution spectrale. C'est une question de compromis entre la résolution spectrale et la capacité de détectabilité des astres. Toutes choses égales par ailleurs, si l'une des dimensions augmente, l'autre diminue obligatoirement.

Raymond - Comment utiliser ce réseau en fin de compte sur mon télescope ?

Aude - C'est simple : vous devez vous arranger pour disposer le réseau quelques dizaines de millimètres en avant de la surface sensible du capteur CCD ou de l'appareil photo numérique, comme je vous le montre dans cette figure :

En absence du réseau, l'image d'une étoile se focaliserait au foyer du télescope et formerait un point dans le plan image. En interposant le réseau dans le faisceau convergeant, vous obtenez toujours une image de l'étoile au foyer, correspondant à l'ordre zéro, mais aussi des spectres de part et d'autre. L'un de ces spectres est plus intense que les autres car il est correspond au blaze du réseau. Dans la figure, les traits du réseau sont perpendiculaires à la feuille.

Christian - C'est aussi simple que cela !?

Aude - Ben oui mon petit Christian, en quelques minutes tu peux construire un spectrographe minimaliste qui permet de "lire" le spectre des étoiles !

Christian - Ben, ça alors !

Raymond - Mais à quelle distance faut-il mettre le réseau du CCD ?

Aude - Avec un réseau ayant 100 traits au millimètre, une distance de 30 à 50 millimètres est correcte. Vous pouvez déjà deviner sur la figure précédente que plus vous éloignez le réseau du détecteur, plus la dispersion sera importante. Je vous donnerais tout à l'heure les formules qui permettent de calculer tout ceci.

Raymond - Comment fait-on pour disposer le réseau ?

Aude - Sûr qu'il vous faut faire un peu de bricolage. Je vous montre sur cette photographie une sorte de porte-filtre à tiroir que j'ai construit et qui se visse à l'avant de la caméra CCD, ici une Audine. J'ai glissé le réseau dans la fente du porte-filtre tout simplement. Les jeux sont éliminés à l'aide de bouts de carton. Ce n'est pas beau, mais ça marche !

Christian - Oui, mais moi je n'ai pas de porte-filtre comme je tiens mon réseau ?

Aude - Je suis sure que tu vas pouvoir bricoler cela très facilement. Je vous montre quelques montages. L'un d'eux, en haut, est en contre-plaqué avec quelques tubes allonges photographiques 42 à vis au pas de 1 mm collé à l'araldite rapide. Il ne vous faudra qu'une petite après-midi pour fabriquer le montage. Je pense que ça en vaut la peine.

Vous avez Internet sous la main, alors regardez quelques autres montages ici ou encore ici. Pas dur. Notez au passage que le réseau utilisé dans ces liens n'est pas le modèle Jeulin, mais le principe d'usage est tout à fait semblable.

Vous devez faire attention à ce que la lumière n'entre pas dans les interstices. C'est la raison de l'usage immodéré du ruban adhésif aluminium dans certains bricolages de ma part, un peu infâmes. Rappelez-vous que le ruban adhésif est un allier très important de l'astronome.

Je vous montre immédiatement ce que cela donne sur le ciel. J'ai pointé une étoile brillante avec une lunette et voici le spectacle sur le CCD :

Alain - C'est l'étoile au centre ?

Aude - Exactement ! Et que remarquez-vous de part et d'autre ?

Christian, Raymond, Alain - (en coeur) un spectre !

Alain - Aude, je dis cela, mais c'est une pure hypothèse à partir des informations que tu as données tout à l'heure, parce que là, je ne vois pas les couleurs.

Aude - Effectivement, la caméra CCD est une Audine qui ne peu restituer les images qu'en noir et blanc. Il faut un peut d'imagination, mais les deux traits de part et d'autre de l'étoile du milieu sont bien des spectres colorés.

Raymond - Ces spectres sont liés aux ordres de diffraction ?

Aude - Oui. Dans l'image que je vous montre maintenant j'ai identifié de ces ordres. Vous pouvez faire sans peine,  je pense, l'analogie avec les spectres colorés de la lampe du bureau.

 

Raymond - Pourquoi cette orientation bizarre du spectre par rapport aux axes de l'image ?

Aude - Il faut avoir en tête que le phénomène de dispersion de la lumière ce produit dans direction qui est perpendiculaire aux traits du réseau. Par exemple, dans l'image précédente, si on voyait le réseau en transparence, les traits apparaîtraient approximativement horizontaux. Dans la mesure du possible il faut essayer d'aligner soigneusement l'axe de dispersion des spectres parallèles aux lignes du CCD, car cela facilite le traitement. J'en suis loin ici !

Christian - Il me semble que l'on voit d'autres étoiles dans l'image ?

Aude - Pas mal Christian ! Il y a bien d'autres étoiles, plus faibles. Si vous êtes attentif, vous aller voir que chacune d'elles est accompagnée d'un spectre. Le petit montage du réseau dans le faisceau convergeant du télescope permet d'acquérir simultanément le spectre de l'ensemble des objets présent dans le champ ! On devine très faiblement ces spectres compte tenu de la magnitude des étoiles dont ils émanent, mais ils sont bien là !

Raymond - Il y a quelques années, j'ai récupéré un réseau dans la revue Ciel & Espace. J'ai bien fait de le garder, il me semble !

Aude - Je vois ce que tu veux dire. Une très bonne initiative de cette revue d'astronomie. Il se trouve que j'ai ce réseau moi aussi. Tenez, je vous le sors.

Mais tu dois déchanter Raymond. Ce réseau ne peut pas nous convenir pour deux raisons. La densité de traits au millimètre est supérieure à 1000, ce qui conduit à des spectres si longs qu'ils débordent la surface du CCD. Ensuite, le réseau n'est pas blazé, si bien que 90% du flux se retrouve dans l'ordre zéro, les spectres eux-mêmes ayant la part congrue. Ce réseau peut être utilisé pour l'observation du Soleil, mais pas pour les autres étoiles. Rappelez-vous que dans le réseau Jeulin c'est le spectre d'ordre 1 qui est largement privilégié. Cela fait toute la différence.

Alain - Il me semble voir les traces de nombreuses poussières dans ton image, Aude ?

Aude - C'est une image brute, directement sortie de la caméra. En effet, elle a quelques défauts. Comme toute image CCD il va falloir lui appliquer un certain nombre de traitements avant de pouvoir l'exploiter vraiment :

(1) retirer le signal d'offset, une sorte de signal constant qui s'ajoute à tous les pixels à cause de l'électronique de la caméra et du capteur CCD lui-même. On isole le signal d'offset en faisant des poses très courtes dans l'obscurité totale.

(2) retirer le signal thermique, un signal qui prend naissance spontanément au niveau de chaque pixel et dont l'intensité est fonction du temps de pose et de la température du capteur. On obtient une image du signal thermique en faisant des images dans l'obscurité totale, mais avec un temps de pose égal à celui pratiqué pour les images du ciel. On appelle souvent l'image thermique le "dark" ou le "noir". Attention, pour que cette image soit vraiment une cartographie du signal thermique, exploitable en tant que telle, il est important de retirer le signal d'offset des images spécifiques longues poses faites dans l'obscurité. Souvent les débutants oublient cette opération : c'est grave, car en retirant le signal d'obscurité des images du ciel, en fait il soustrait deux fois le signal d'offset - nous l'avons déjà fait à l'étape (1), rappelez-vous. Le résultat n'est pas du tout correct : après cette fausse manœuvre, de nombreux pixels de l'image peuvent avoir des intensités négatives par exemple.

(3) diviser le résultat des deux soustractions précédentes par une image obtenue en pointant le télescope vers une scène la plus uniforme possible. Cette image s'appelle un "flat-field", que l'on traduit mal en français par l'expression "champ plat". Cette division permet de supprimer les inhomogénéités de réponse des pixels, et donc, en particulier les ombres des poussières bien visibles dans mon image brute.

Je ne vais pas insister sur ces opérations, dites de "prétraitement". Elles sont classiques en imagerie CCD astronomique.

Je vais simplement préciser ici que pour faire le flat-field, il est indispensable que le réseau soit en place. En outre, il ne doit pas être déplacé entre le moment où vous faites les images du ciel et l'image flat-field.

Alain - Je peux utiliser n'importe quel logiciel pour faire le prétraitement.

Aude - Oui, ce sont des procédures classiques pour les logiciels de traitement d'images astronomiques. Selon le programme, la convivialité sera plus ou moins au rendez-vous, ainsi que le degré d'automatisation, mais vous arrivez toujours au bout de la tâche. Donc, il n’est nullement question de changer vos habitudes lorsque vous faites des images spectrales telles que celles que je vous montre ici. Je vous expose rapidement la procédure de prétraitement avec le logiciel Iris. Supposons que les images d'offset, thermique, et flat-field aient pour nom OFFSET, DARK et FLAT. Supposons de plus que nous ayons fait une séquence de 11 images de l'étoile Zeta Taureau. Ces images ont pour noms sur le disque ZTAU-1, ZTAU-2, ... ZTAU-11. On sélectionne une étoile parmi celles présentes dans la première image de la série en dessinant un petit rectangle qui l'englobe avec la souris, puis on lance la boîte de dialogue de traitement automatique :

Le logiciel effectue le prétraitement sur les 11 images, les recentre automatiquement, puis les additionne. Je recommande de cocher l'option "Interpolation spline" pour avoir une image compositée finale un peu plus résolue. Si après addition, le résultat dépasse le niveau 32767, qui est la limite supérieure possible avec Iris, vous pouvez reprendre uniquement l'addition des images avec la commande ADD_NORM, ou tout autre fonction de compositage. ADD_NORM s'arrange pour que le résultat de l'addition ne dépasse pas le niveau 32767 en multipliant chaque image individuelle par un coefficient adéquat :

ADD_NORM  I  11

Alain - Je voudrais revenir à l'image du spectre. Qu'est-ce qu'elle nous montre au juste ?

Aude - En faisant un examen attentif, nous allons voir quelques raies spectrales en absorption. Affichons le spectre, acquis en binning 1x1 afin de bénéficier de la meilleure résolution possible. Il s'agit du spectre de l'étoile 69 Lion, de type spectral A0V :

J'ai marqué la position de quelques raies, ces manques de couleurs dont la trace est perceptible dans le continuum de l'étoile.

Raymond - Type spectral ?

Aude - Les étoiles ne se ressemblent pas. Et tu sais, les astronomes, et les scientifiques en général, aiment bien classer. C'est le début de toute démarche visant à comprendre ce que l'on voit. On attribue des types spectraux prédéfinis suivant l'allure. Je vous rappelle que cette allure peut dépendre de très nombreux paramètres physiques : taille de l'astre, température, son age, ...

Christian - A quels éléments chimiques correspond les raies que tu nous montres ?

Aude - Tu poses le problème de l'identification des raies spectrales. C'est un sujet souvent très déroutant lorsqu'on débute en spectrographie, et particulièrement lors de la première mise en route d'un spectrographe, car on manque alors de repère. Le choix de l'étoile 69 Leo n'est pas innocent. Son spectre est caractéristique des étoiles chaudes qui montrent presque exclusivement les raies de l'hydrogène avec un fort contraste. Les 3 premières marquées à gauche indiquent du reste des raies produites par l'hydrogène, mais j'admets que ce n'est pas évident. L'idéal serait de pouvoir associer une longueur d'onde à un numéro de pixel dans l'image. On appelle cela un "étalonnage spectral". En regardant dans des tables qui donnent la longueur d'onde des différentes raies, l'identification des éléments chimiques devient alors possible. Nous allons nous atteler à cette tâche...

Raymond - Cette tâche me semble énorme. Je désespère de pouvoir m'en sortir quand je vois ce type d'image. En plus, les couleurs ne sont même pas là pour m'aider !

Aude - Pas de panique ! Je vais vous donner une procédure imparable avec un zeste de petites formules mathématiques. Pas dur vous allez voir. C'est même un travail d'enquête plutôt amusant ! Ce qu'il faut faire, c'est viser des étoiles brillantes dans lesquelles on est sûr qu'une raie précise est en émission intense. Ce point de repère lumineux et saillant dans le spectre sera notre pierre de Rosette pour décoder tout le reste de l'information qu'il contient. Parmi ces étoiles, je vous recommande celles indiquées comme type Be, dont les plus brillants exemplaires sont Gamma Cassiopée, Delta Scorpion, 48 Balance, Kappa Dragon, Zeta Taureau, ... Voici par exemple le spectre de Zeta Taureau :

Une surbrillance apparaît un peu à la droite du centre du spectre. C'est la raie de l'hydrogène, dite Ha (prononcer "H alpha"), dans la partie rouge. C'est une raie très importante, souvent scrutée pour comprendre bon nombre de phénomènes dans les objets du ciel. Rappelez-vous que l'hydrogène est le principal constituant de l'univers. La raie Ha apparaît toujours en forte émission dans cette étoile. On ne peut pas la manquer. Elle prend naissance en fait dans un nuage de gaz en rotation rapide autour de l'étoile. La longueur d'onde de raie Ha est 6563 angströms.

Alain - D'où sors-tu cette valeur ?

Aude - Les spectroscopistes connaissent bien la position de cette raie. C'est vraiment un grand classique, un peu comme le nombre Pi. On trouve un peu partout des tables qui donnent la longueur d'onde des principales raies spectrales. Cliquez ici par exemple. Si vous utilisez VisualSpec, un programme spécialisé dans l'analyse spectrale, vous pourrez accéder interactivement à la liste des raies par éléments chimiques.

Voici à présent la procédure. Dans figure suivante, colorée en fausses-couleurs, j'ai noté la valeur en pixels qui sépare, le long de la dispersion spectrale, le centre de l'image de l'étoile à l'ordre zéro et la position de la raie rouge de l'hydrogène. Servez-vous par exemple du curseur d'image de votre logiciel de traitement favori pour déterminer cette valeur. J'ai trouvé ici X=260.

 

Une construction géométrique simple va nous permettre à partir de ce simple relevé de trouver la longueur d'onde de tous les autres points du spectre :

Vous reconnaissez le schéma de principe d'utilisation du réseau dans le faisceau convergeant du télescope. Je l'ai simplement simplifié en me contentant de ne représenter que le rayon associé à une seule longueur d'onde - ici la raie rouge de l'hydrogène. La valeur X qui nous avons mesurés sur l'image spectrale de Zeta Taureau est indiquée sur cette figure. C'est la distance entre l'image d'ordre zéro et un point du spectre pour un ordre donné. L'angle correspondant q est donné par la relation :

avec k, l'ordre d'interférence, n, le nombre de traits par millimètre gravés sur le réseau et l, la longueur d'onde. Faisons l'application numérique avec :

k = 1 (ou -1, cela ne change rien au résultat)
n = 100 traits/mm
l = 0,6563 . 10-3 mm

Alain - Il ne faut pas ce tromper dans les unités je suppose ?

Aude - Sur ! Puisque le nombre de traits du réseau s'exprime en millimètres, il faut donner la longueur d'onde aussi en millimètres pour être homogène. Voici le résultat du calcul :

Alain - Si je fais k = -1, je trouve le même angle, mais avec un signe opposé. Cela me permet de décrire le spectre qui se trouve de l'autre coté de l'ordre 0.

Christian - Ah, on voit là le matheux !

Aude - Exactement. Et si tu fais k = 2 tu trouves l'angle que font les rayons lumineux lorsqu'ils sortent du réseau pour le spectre d'ordre deux, et ainsi de suite. Je vais à présent vous remémorer votre cours scolaire de géométrie pour calculer la distance D, connaissant X et l'angle q. La réponse est bien sur :

Exercice ! Je veux la distance D en millimètres séparant la surface du CCD et le réseau. Qui peut me donner le résultat ? A vos calculettes...

Alain - Flûte, je n'ai plus de piles !!!

Raymond - J'ai le résultat ! On a mesuré tout à l'heure X=260 pixels. Comme les pixels du CCD de la caméra Audine font 9 microns de coté, alors la valeur de X en millimètre est : 260 . 9.10-3 = 2,340 mm. D'où la valeur de D :

Aude - C'est le bon résultat, bravo !

Christian - Mais j'aurai pu trouver directement la solution en mesurant la distance entre le CCD et le réseau avec une simple règle. Pas de besoin de faire des maths !

Aude - Tu aurais certes obtenu une valeur proche, mais pas aussi précise. Il faut par exemple ce rappeler que les verres traversés, comme le hublot de la caméra, influences le résultat car c'est une épaisseur optique qu'il nous faut calculer ici. Le paramètre D est une constante fondamentale de l'instrument. La valeur ne change pas à partir du moment où l'instrument n'est pas démonté et elle va permettre de réaliser l'étalonnage spectral de tous les spectres acquis.

Une valeur dérivée importante des calculs précédents est la dispersion P du spectrographe en angstroms par millimètre. On trouve aisément l'équation :

avec p la taille d'un pixel du CCD. Faisons l'application numérique :

La dispersion peut être calculée de manière plus directe encore à partir de l'équation - suivante, un peu compliqué certes, mais efficace :

soit en valeur numérique

Petit exercice. J'ai trouvé dans le spectre de Zeta Taureau une raie sombre bien marquée à la distance de 303 pixels par rapport à l'image d'ordre zéro. Qu'elle est la longueur d'onde de cette raie ?

Alain - Je calcule tout d'abord l'angle q en faisant :

puis j'obtiens la longueur d'onde en angstroms par :

Aude - Houai, super !

Raymond - Et l'application numérique, cela donne quoi ?


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